Petit Léxique Poétique
janeiro 15, 2018
R.Roldan-Roldan
Petit Léxique Poétique
suivi de
Eros, Amen
Poésie
l´Absence
Puits sans eau
fenêtre murée
plage sans mer
squelette d´oiseau en cage
trou au coeur
vie en friche
l´irréversible séchant l´âme
#
l´Adolescence
Intenses deviennent la masturbation
et la fureur d´être
le rêve et la passion
solitaire
elle déguste des livres et des films
écrit compulsivement
et nie sa parole aux autres
qui ne comprennent rien
à cette prime jeunesse
qui l´inonde du sperme des songes
#
l´Amour
Se niche dans des trous louches
tel um insecte fuyant la peur
s´enfuit dans des labyrinthes frigides
enveloppé d´effluves écoeurants
parfois il rêve des explosions du sang
des tambours du coeur et
des pétales de coquelicots emportés par le son du clavecin
#
l´Amour II
Et puis au fil des soleils
levants couchants
il s´effiloche
sans bruire
le désespoir s´installe
sourd muet
et la joie s´enlise
dans les sables mouvants de l´indifférence
et puis un beau jour il se lève livide
le lit est vide
#
l´Apatride
Il est seul
il est different
étranger on le montre du doigt
il ne ressemble à rien
il n´appartient à rien aime tout et rien
voudrait ressembler aux autres
toujours déplacé il se demande ce qu´il est
son coeur toujours ailleurs se plaît aux abîmes
sa pensée toujours ailleurs vague sur les nues
il parle plusieurs langues il a l´accent
il aime la littérature d´un pays
la philosophie d´un autre
la peinture d´un autre
la musique d´un autre
la passion d´un autre
la raison d´un autre
il est tout il n´est rien
voudrait quelqu´un qui soit tout et rien
rêve aux racines primitives
il cherche
il est seul
#
l´Ascète
Il se vide pour se remplir
se dépouille pour s´enrichir
ferme les yeux pour voir
méprise la carapace
cultive la Raison
et sourit
non pas à Dieu ni aux prophètes
mais à l´Infini
à l´Absolu
au Silence
mais
gourmet et addicte au sexe
il est baroque
à table et au lit
#
le Bonheur
Après-midi de printemps
la brise ouvre les rideaux blancs aux jasmins
sur son lit à côté de son bébé
un jeune papa contemple son enfant
paisiblement
il ne sait pas prier
mais son âme qui transborde de tendresse
s´élève vers l´Absolu
que seul l´amour atteint
il sourit et ramasse des instants d´éternité
#
la Compétition
Sainte pute du dieu Argent
ça brille comme l´or
ça vend
l´épouse la fille la mère
aux enchères
l´éthique connais pas
prostituition
on l´appelle Divine Néo
se croit étertnelle
et crucifie les démons supérieurs
#
les Conventions
Bâtardes
maquillées
vulgaires
elles surveillent le trottoir des sentiments
et veules et louches
codifient le comportement
fières de conduire le troupeau
des non-élus par la passion
vers le havre rassurant
de la prostituition comme il faut
#
Dieu
Il bâille
s´emmerde
légèrement suranné
il fume de l´opium
et boit de l´absinthe
pour oublier l´imbécilité des humains
au petit matin il se branle
et sourit aux cartésiens contestataires
à qui il dédie son éjaculation
n´ayant rien à faire il se recouche
#
l´Ecrivain
Son rêve fait pâlir la réalité
dans un monde de passion
la couleur de ses personnages
efface celle des êtres réels
il fait l´amour avec les mots
et la pollution nocturne surpasse le sexe
quand les phantasmes s´en donnent à coeur joie
#
l´Enfance
Regard ébahi
étrange est le monde
déjá la solitude la ronde
cachée sur les arbres
ou dans une maison en ruine
clair est son sourire se balançant
entre la rigueur et la rationalité de son père
et la tendresse et la foi de sa mère
elle contemple les oiseaux
qui dessinent des messages secrets sur le firmament
#
l´Exil
Il a la gueule du différent
les gestes de l´absent
il pue la nostalgie
la couleur de sa peau sent l´exotique
il boude les sources et pourtant
il pleure les neiges d´antan
et la musique des dunes
#
l´Exil II
Dans son propre pays
valeurs vulgaires
éthique batârde
ça pue la bourse avide
et la phtisie de l´âme
la masse défèque sa culture
et les lois ont un goût moyenâgeux
on dépile l´amour
stérilise la pensée
et dans l´arène on jette des camélias aux gladiateurs
qui se vendent aux enchères
du Nouveau Temple
tandis que les dieux s´ennuient
et se grattent les couilles
#
la Foi
Languide sourire
de sainte Thérèse de banlieue après l´orgasme
désirs refoulés
elle expose sa culpabilité au bon Dieu
qui narquois conseille
jouis espèce d´idiote pour te purifier
avant de m´adresser la parole
car la joie de la jouissance purifie et délivre
bien plus que l´abstinence
qui pue la mort
#
le Frère
Il voit la lumière au Maghreb
son sang andalou chante l´anarchie paternelle
il lit Bakounine
aux tropiques il prend les armes contre les dictateurs
il se passionne pour le cinéma
aime Angelopoulos Antonioni Bergman
Kieslowski Kubrick Tarkovsky
écrit des essais
et pur
part jeune
#
la Gloire
Elle scintille étincelle
brille aux éclats
tournoie tourbillonne
et s´élêve propulsée par l´Art
fusée en état de grâce phallus bienheureux
vers l´espace sidéral de la Beauté
et explose en myriades de constellations
#
le Hasard
On le nomme Dieu
ou Destin
son masque grec
sourire ou rictus
traduit le cycle qui le régit
énigmatique et fascinant
il trompe la Raison
#
l´Humilité
Elle baisse le ton de sa voix
dit non sans arrogance
tout en gardant sa dignité
devant l´imbécilité
apprend sans faire semblant
salue la vie
et la remercie
#
L´Identité
Elle se regarde au miroir et le brise
les fragments s´incrustent dans sa chair
son visage se multiplie
elle cherche en vain des points de repère
des figures effacées
des mémoires trompées
des rues moyenâgeuses des paysages neigés
ou les ergs douloureux
elle rêve aux étiquettes
mais ne trouve aucune qui lui siée
#
l´Imbécilité
En ce siècle de suprême vulgarité
elle grasse tout
se pavane partout
Art politique religion media comportement
elle glorifie les merdes ensoleillées
glousse après avoir pondu son oeuf
glamoureuse et stupide elle lèche la mediocrité
pute éclatante du système
elle brille le temps d´une allumette
s´adonne à la félation du dieu Publicité
voire prostituition
se laisse sodomiser par le dieu Argent
et défèque de l´or fake pour les ignorants
en chantant
#
la Jeunesse
Tel un phallus jupitérien
crachant sa fureur de vivre
d´insolence en transgression
de passion en rage
elle boit l´existence jusqu´à la satiété
et abreuve ses jours de soifs dionysiaques
et d´élans libertaires
tandis que Chronos trompeur
se charge de la démentir
en lui niant l´éternité
#
Kinema
Le rêve la magie la féérie dans le noir
lumière des Lumière
pour oublier la dure l´amère réalité
constellations
Greta Garbo Jeanne Moreau Anna Magnani
Annie Girardot Romy Schneider Jean Seberg
Vanessa Redgrave Anouk Aimée Vivien Leigh
et les dieux
Visconti et le bal du temps perdu
Resnais et la mémoire à Hiroshima et Marienbad
Antonioni et l´arthrose des mots qui se vident
Bergman et les fraises sauvages plongées dans le silence
Buñuel et la bourgeoisie promenant son chien andalou
Saura et les quatre loups de l´Apocalypse
Demy et les couleurs de la chanson de Cherbourg
Kaneto Shindo et la farandole des démons
Welles et l´énigme Rosebud
Angelopoulos et la grandeur éternelle de la Grèce
et l´évasion de l´adolescent tangérois solitaire et farouche
qui cherche des bouts de ferraille qu´íl vend heureux
pour aller au ciné
#
la Liberté
Altière hautaine fière
belle à en mourir
elle couche avec l´Intelligence et la Raison
méprie les couards
ignore les conventions
svelte et élégante
elle sourit à la Révolution
supérieure elle dédaigne la modération
insolente elle défie le Pouvoir
et rit aux éclats en regardant les mesurés
#
la Mère
Son regard doux se mouille de nostalgie
elle lit le journal elle paysanne d´un autre pays
aime Les feux de la rampe de Chaplin
La dame aux camélias de George Cukor
Nada de Carmen Laforet et Carlos Gardel
raccommode les chaussettes de ses enfants
en leur racontant des histoires de la famille et de la guerre
prépare un maigre bouillon de pattes de poulet
et quand l´exil lui serre la poitrine
elle murmure sa priere à la Vierge
#
la Misère
Boiteuse elle traîne sa savate
borgne elle défie les détails
elle fouille les ordures
qu´elle dispute aux urubus
rêvant de dénicher un tout petit trésor
qui lui permette de boucler la semaine
et quand la pluie se met à tomber
elle ouvre son parapluie troué
et sourit édentée
quand le soleil revient
#
la Mort
Sans fanfares ni tambours
discrète et domestique
elle fauche les êtres aimés
et installe sa présence au sein de nos convictions
pour nous rappeler le néant
et nous dire
profite-s-en demain sera trop tard
#
le Néant
Il côtoie la Mort à l´Ouest
longe l´Absolu à l´Est
s´écarte du Vide
vague parmi les astres
rien ne l´atteint
ni l´amour ni le chagrin
il sourit au vol de l´aigle
plane
quand tout devient Silence
berçant le Sens au creux du Sacré
#
l´Opulence
Yeux bleus saillants
sourire fake à la Mona Lisa
lèvres pincées à la Goya
elle fait sonner ses bracelets
comme une vache son grelot
balance ses fesses felliniennes
et pète en riant aux éclats
et rêve vaguement à l´engin d´un beau luron
tandis quelle caresse tendrement de son médium
sa charlotte mouillée
#
la Passion
Leste et intrépide
elle fait bouillir le sang
tourbillonne le coeur et chasse la raison
elle soulève les sentiments
émeute contre les conventions
révolution
elle libère les élans
plonge dans la liberté
défie la mort
et hurle jouissons
#
le Père
Les éclats de la guerre
le mutisme et le Silence
cohérence absolue
l´anarchie comme élévation
et Nietzsche au chevet
il aime Chaplin Garbo et Dostoïevski
il rêve parfois
sans en avoir l´air
généreux et dur seigneur
comme la Nature
#
le Poète
Lourde est sa vie
sa poche est vide
ses amours se sont évanouies
ses amis sont partis
il a oublié la choreographie des étoiles
et le vol des cygnes en flammes
il ne sait plus s´il écrit par passion
ou par désespoir
il boit le Silence
à petites gorgées
#
la Puberté
Elle vend des vieux journaux
des bouts de ferraille
et du bois
pour s´acheter un bouquin
ou aller au cinéma
elle rêve de manger des gâteaux
elle rêve d´aventures fantastiques
et de vaisseaux volants
elle ramasse des songes sur la plage
et se donne du plaisir en cachette
#
la Quête
De cime en abîme
elle ronge les entrailles
d´ascèse en catharsis
elle fertilise le cerveau
de soif en nausée
elle rajeunit le sacré cylindre de la création
de chevauchée en méditation
elle remplit les saintes sphères du désir
de deséspoir en révolution
elle sacre le courage d´être soi-même
#
le Rebelle
Ne ressembler à rien
ne suivre personne
la fierté d´être soi-même
quand les tendres années cherchent
quand la passion n´a encore que 20 ans
la sagesse est vieille
lointaine
#
la Religion
Catin puissante puante
maîtresse de l´imbécilité
elle étouffe la pensée
suffoque la passion
étrangle la Raison
émascule la chair
châtre le désir
avachit la volonté
souille la pureté
et crève les yeux de la Liberté
#
le Rêve
Travelling
un champ de blé parsemé de coquelicots
mais ce n´est qu´un flash-back
la foule des nuits traîne l´angoisse
de crever sans être arrivé
même si l´ange de l´Art lui souffle
continue mon pot
la mort ne t´arrêtera pas
tes os s´en souviendront
et les maudits aussi
#
Self help
Livre de saison
doucement con
miséreux affamé
auto-sodomie
auto-imbécilisation
ça vend
comme les bananes aux tropiques
#
le Sexe
La joie du coeur
de l´intestin
du cerveau
l´allégresse d´être avant d´en finir
et parfois
il offre son bras à l´amour
pour une flânerie éphémère
qui fait gicler des promesses étourdissantes
sous les arbres sceptiques
et les buissons moqueurs
#
le Sexe II
Tambour battant
les sphères valsent Strauss
et le cylindre en état de grâce peint Bosch
rugit le volcan
les spasmes crachent l´éruption
le rideau se léve et dévoile
le sourire dégringolant de la cime
#
le Silence
Il élargit l´âme
l´apaise
élève l´esprit
adoucit le corps
et raconte la balade de l´onde
et les secrets du feuillage
parfois un oiseau solitaire
le brise soudain
pour le nomer
et le dialogue recommence
#
la Solitude
Les yeux cernés
la mine livide
les lèvres pâles
les cheveux gluants
elle traîne ses sabots sous les ponts
trempée jusqu´â l´âme par le crachin
en quête d´un pauve solitaire
pour retrousser ses jupons mouillés
parfois elle entend les cri-cris de son enfance
et croit rêver
#
les Souvenirs
Irréversibles
ils sont lourds
même quand ils sont légers
et lointains
acharnés ils harcèlent la mémoire
l´assaillent
la tourmentent
même quand ils sont doux
pas de paix possible
dans les entrepôts du passé
#
le Temps
Il est sage
farceur menteur trompeur blagueur
suit sa routine
se moque des vivants
qui lui font pitié
et ramasse les jours les nuits les ans
comme des feuilles mortes
qui n´ont plus de nom
dans le parc aux illusions fanées
ou manquées
#
l´Uchronie
Elle vote la plus belle langue du monde
et le grec devient la langue officielle aux USA
épargne la tête de Louis XVI
et celle de Marie-Antoinette
exile les Romanov en Allemagne
fait assassiner Hitler par Claus von Stauffenberg
révèle l´énigme d´Isidore Ducasse
de Kaspar Hauser
du dialogue entre l´arbre et la terre
de la musique des fleurs
#
la Vieillesse
Clopin-clopan
elle raccommode son existence
contemple sa vie à la lunette
tricote les souvenirs
fouille le tiroir de la mémoire
à la recherche d´une lettre ou d´une mèche de cheveux
regarde par la fenêtre un monde qui n´est plus le sien
hausse les épaules
parce que rien n´est important
quand le départ est proche
#
les Wasp
Frères du fascisme
cousins des nazis
fanatiques religieux
ils pillèrent et anéantirent la nation amérindienne
holocauste du peuple indien d´Amérique du Nord
et ils se vantent d´être les fondateurs des USA
go back to Europe foreigners
#
le Xénophobe
Rachitique d´esprit
misérable de coeur
court de pensée
l´intelligence atrophiée
il hurle invoquant les dieux
maudissant les différents
et se trompe d´Amour
#
les Yankees
Naïfs retardés cruels
ils s´enferment dans leurs frontières
ne sortant que pour bombarder
se croient démocratiques
et pourtant ils font croître
des Chomsky e des Susan Sontag
des Woody Allen et des Orson Welles
des Joan Baez des Janis Joplin e des Tom Waits
des Jane Fonda et des Jean Seberg
des Tennessee Williams et des Edward Hopper
#
Zen
Jardin de sable sous la pluie
les yeux mi-clos
parcourent l´enclos du minuscule Néant
les gouttes perlent du feuillage
le sourire s´emplit de vastitude
l´anxiété se dégonfle
le Silence berce le Sacré
#